Les événements d’hier ressembleront-ils à ceux de demain ?

Anthony Fauré

Directeur Marketing et Innovation chez UNIMEV
Rédacteur en Chef de l'Innovatoire.

Ces derniers temps le secteur de l’événementiel est fortement impacté. Pensez-vous que les événements d’hier ressembleront à ceux de demain ?

AF : il est compliqué de parler en généralité tant les événements sont divers dans leur format et public rassemblé. Ce qui est à peu près sûr, c’est que la crise accélèrera les mutations qui étaient déjà à l’œuvre : digitalisation de l’offre événementielle sur tout son champ d’expérience (online et onsite), réflexion sur la taille des événements (de nombreux nouveaux formats se veulent plus petits, intimes, qualifiés), aspiration à mettre du contenu dans tous les événements, compréhension des besoins fondamentaux de réunir les écosystèmes régulièrement pour maintenir le lien, etc.

Je pense donc que les événements continueront d’intégrer les nouvelles solutions techniques et technologiques pour y parvenir, de réfléchir à leur processus de production pour intégrer les enjeux environnementaux, toujours avec le même objectif : apporter de la valeur ajoutée à ses publics, quels qu’ils soient.

 

Selon vous, certains événements doivent-ils réinventer leur modèles conceptuels ou économiques ? Si oui, quels modèles peuvent être viables à moyen terme ?

AF : Pour faire simple, je pense qu’il est nécessaire de passer d’une logique « d’événement » à une logique de « design de service » global. En d’autres termes, il y a ce que l’événement apportera à un instant T et ce qu’il apportera toute l’année à son écosystème grâce à la palette des outils disponibles : du contenu, de la mise en relation business, de la traction d’innovation, du conseil en intelligence, des profils à recruter… En pensant « événement », on pense offre alors qu’il faut penser besoin client et articuler derrière son savoir-faire à monétiser.

Enfin, la logique « avant / pendant / après » a eu la grande vertu de faire comprendre qu’il n’y a pas que le temps événementiel qui compte. Cependant cette logique compartimente la réflexion alors qu’il faut l’appréhender de manière globale pour concevoir une expérience sans couture. Je pense que de plus en plus d’organisateurs réfléchiront de cette manière.

 

En tant que responsable de l’innovation chez UNIMEV, quelles sont les tendances de transformations digitales que vous avez déjà pu observer ?  

AF : Ces dernières années, hormis les innovations très « expérientielles » qui ont été sous le feu des projecteurs (avec la VR ou l’AR), j’ai constaté de nombreuses innovations marketing se développer pour mieux cibler, maîtriser et faire parler sa data. Mieux suivre le parcours du client online et onsite, mieux regrouper et connecter ses stocks de datas clients, utiliser des solutions de marketing prédictif, aller plus loin dans la personnalisation des messages à chacun.

En réalité, ces solutions démontrent un intérêt envers son public, en essayant de le comprendre pour lui délivrer une bonne expérience. Je trouve que c’est une démarche intellectuelle pertinente et c’est plaisant de voir de nombreux fournisseurs de solution innover en ce sens.

 

Selon vous, quels sont les meilleurs atouts de réussite d’un modèle d’événement phygital ?

Le meilleur atout pour réussir est de chercher à être utile, tout simplement, et encore plus dans le modèle phygital… qui devient la norme. Et pour être utile, il faut comprendre dans le parcours de ses publics ce qui peut être accessible digitalement (une fiche produit, par exemple) et ce qui doit être favorisé physiquement (écouter la marque exposer sa stratégie et vision du monde, par exemple). Quel intérêt à retrouver sur un événement les informations disponibles sur internet ou des sites de consommateurs ? Il faut que la rencontre serve à autre chose, à davantage de discussion, de partage, d’expérimentation, de co-construction…

 

Pensez-vous que les événements en ligne menacent une partie des métiers de l’événementiel ?

Sans doute, ils menacent les événements qui finalement, dans l’esprit des publics, ne méritent plus réellement de faire l’effort de se déplacer. Si l’expérience est la même (ou quasiment) physiquement ou en ligne, pourquoi la tenir encore physiquement avec les coûts que cela comporte ?

Je pense qu’une série d’événements (des Assemblées Générales, certaines petites conférences, séminaires…) sont grandement menacés par les outils que nous avons pris l’habitude d’utiliser pendant cette période. A chaque événement d’aller plus loin en exploitant mieux sa capacité de mise en rencontre et interaction.Mais il est sûr que les événements passifs, descendants, peu engageants… ont du souci à se faire.

 

Comme avec l’essor des réseaux sociaux, pensez-vous que des événements physiques vont profiter de ces moments de réflexion pour développer des événements digitaux complémentaires pour se développer ?

Je pense en tout cas que cela ouvre le champ de nombreuses possibilités ! Certains vont réfléchir à une stratégie de double pricing (l’événement virtuel étant une version dégradée de l’événement physique), d’autres vont se mettre à organiser des petits événements virtuels entre deux éditions de l’événement physique pour animer leur communauté ; enfin des derniers enregistreront leurs événements physiques et permettront aux publics d’y accéder ensuite sur la base d’une nouvelle stratégie tarifaire, en mode offre de service d’un contenu de qualité, presque « formation ».

Ce qui me plait beaucoup dans ces réflexions est qu’on se rend compte de l’importance d’avoir une stratégie de contenu, car sans contenu, pas d’événement virtuel ! Cela oblige donc tout à chacun à s’interroger sur le contenu pertinent qui fera que l’audience souhaitera se connecter pour en profiter, de belles réflexions en perspective.

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